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Les spécialites de la procédure d'appel

Revue de Jurisprudence

Les obligations du juge au regard du principe du contradictoire

Aux termes de l’article 16 du CPC « Le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction… ». La Cour de cassation dans deux arrêts a rappelé ce principe directeur du procès qui s’impose aux parties comme aux juges. La première de ces deux décisions, inédite, a été rendue le 1er février 2018 par la 2e chambre civile de la Cour de cassation, n° de pourvoi : 16-18427. Cette décision rappelle que l’article 16 du CPC s’impose au juge quel que soit le moyen soulevé d’office : « Qu’en relevant d’office une fin de non-recevoir sans inviter les parties à présenter leurs observations, la cour d’appel a violé le texte susvisé ; » La seconde décision, publiée au bulletin, a été rendue le 1er mars 2018 par la 2e chambre civile de la Cour de cassation, n° de pourvoi : 16-27592. La Cour de cassation rappelle par cette décision que lorsque l’ordonnance de clôture est révoquée par la cour d’appel dans son arrêt, elle doit alors rouvrir les débats. Au visa des articles 16 et 784 du CPC, la cour décide : « Attendu que l’arrêt ordonne la révocation de l’ordonnance de clôture, fixe la nouvelle clôture de l’instruction au jour des débats et confirme l’ordonnance entreprise ; Qu’en procédant ainsi, sans ordonner la réouverture des débats, la cour d’appel a violé les textes susvisés ; ».

EXCEPTION DE NULLITÉ – PRINCIPE AVANT TOUTE DÉFENSE AU FOND

La Cour de cassation dans un arrêt publié au bulletin, rendu le 1er février 2018, 2e chambre civile, n° de pourvoi 16-27322, rappelle le principe selon lequel les exceptions de nullité doivent être soulevées in limine litis.

Au visa des articles 74 et 122 du CPC, la cour a jugé « qu’en accueillant l’exception de nullité de la signification des conclusions de l’appelant alors qu’elle avait constaté que l’intimée avait préalablement fait valoir sa défense au fond, la cour d’appel a violé les textes susvisés ; ».

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PÉREMPTION – DILIGENCES UTILES – OBLIGATIONS DES PARTIES

La lettre d’une partie sollicitant la fixation à l’audience du dossier est interruptive de péremption. Cependant, si le juge ne répond pas à cette demande et que plus de deux années s’écoulent sans aucune diligence, alors, même si la partie n’avait plus l’intention de conclure, la péremption est acquise.

C’est ce qu’a jugé la Cour de cassation dans un arrêt publié au bulletin, rendu le 1er février 2018, par la 2e chambre civile de la Cour de cassation, pourvoi n° 16-17618.

« Mais attendu qu’après avoir justement retenu que la demande de fixation avait eu pour effet de faire courir à compter du 21 juin 2013 un nouveau délai de péremption, la cour d’appel, qui a constaté que, dans le délai de deux ans expirant le 21 juin 2015, aucune conclusion, aucune diligence de nature à faire progresser l’affaire ni aucune nouvelle demande de fixation n’étaient intervenues, en a exactement déduit, peu important l’intention déclarée de l’appelante de ne plus conclure, que la péremption de l’instance était acquise ; ».

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DÉFÉRÉ – DÉLAIS DE DISTANCE NON

Dans un arrêt du 11 janvier 2018, rendu par la 2e chambre civile de la Cour de cassation, pourvoi n° 16-23992, la cour juge que « la requête en déféré est un acte de procédure qui s'inscrit dans le déroulement de la procédure d'appel et n'ouvre pas une instance autonome, de sorte que l'augmentation de délais prévue par l'article 643 du code de procédure civile pour les personnes domiciliées à l'étranger, lorsque la demande est portée devant une juridiction qui a son siège en France métropolitaine, ne s'applique pas à ladite requête ; »

En conséquence c’est à bon droit que la requête en déféré, formée plus de quinze jours après l’ordonnance du CME, a été jugée irrecevable.

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ASTREINTE POINT DE DÉPART

Le point de départ de la liquidation de l’astreinte est source de nombreux conflits.

La Cour de cassation a été amenée à rappeler que l’astreinte est un accessoire de la condamnation et que sa liquidation est fixée par le juge qui l’ordonne au dispositif de sa décision.

L’article R. 131-1 du code de procédure civile d’exécution dispose : « L'astreinte prend effet à la date fixée par le juge, laquelle ne peut pas être antérieure au jour où la décision portant obligation est devenue exécutoire.
Toutefois, elle peut prendre effet dès le jour de son prononcé si elle assortit une décision qui est déjà exécutoire. »

La Cour de cassation, dans un arrêt publié au bulletin, rendu le 1er février 2018, par la 2e chambre civile, n° de pourvoi 17-11321, a ainsi jugé « que l’astreinte prend effet, selon l’article R. 131-1 du code des procédures civiles d’exécution, à la date fixée par le juge ; qu’ayant relevé que l’astreinte accessoire à la condamnation est expressément soumise par le dispositif du jugement en ce qui concerne son point de départ, à la formalité particulière de la signification par acte d’huissier de justice, la cour d’appel a exactement retenu que si le jugement est exécutoire pour le paiement de sommes et la remise de documents sociaux dès sa notification par le greffe, en l’absence de signification, l’astreinte n’avait pas couru ; ».

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PRESCRIPTION – RENONCIATION

Une partie s’est prévalue de la prescription après avoir conclu au fond une année avant.

La cour d’appel, pour débouter le débiteur de cette fin de non-recevoir, a jugé qu’en ayant conclu au fond plus d’un an avant d’avoir soulevé la prescription, celui-ci avait ainsi renoncé tacitement à se prévaloir du moyen.

Cependant, la Cour de cassation par un arrêt rendu le 12 avril 2018, publié au bulletin, 2e chambre civile, pourvoi n° 17-15434, casse très logiquement l’arrêt de la cour d’appel au visa des articles :
- 2251 du code civil aux termes duquel « La renonciation à la prescription est expresse ou tacite. La renonciation tacite résulte de circonstances établissant sans équivoque la volonté de ne pas se prévaloir de la prescription. »
- Et 123 du CPC qui dispose : « Les fins de non-recevoir peuvent être proposées en tout état de cause, sauf la possibilité pour le juge de condamner à des dommages-intérêts ceux qui se seraient abstenus, dans une intention dilatoire, de les soulever plus tôt. »

La cour statue en rappelant que : « le fait pour une partie de déposer des conclusions avant d’invoquer, à un moment quelconque de la cause, la prescription, n’établit pas sa volonté non équivoque de renoncer à cette fin de non-recevoir, la juridiction de proximité a violé les textes susvisés ; ».

ARTICLE 462 DU CPC (Requête en rectification d’erreur matérielle) DÉLAI DE PRESCRIPTION POUR PRÉSENTER LA REQUÊTE - NON

La Cour de cassation dans un arrêt en date du 7 juin 2018, publié au bulletin, 2e chambre civile, n° de pourvoi 16-28539, a jugé au visa de l’article 462 du CPC qui dispose :

« Les erreurs et omissions matérielles qui affectent un jugement, même passé en force de chose jugée, peuvent toujours être réparées par la juridiction qui l'a rendu ou par celle à laquelle il est déféré, selon ce que le dossier révèle ou, à défaut, ce que la raison commande.
Le juge est saisi par simple requête de l'une des parties, ou par requête commune ; il peut aussi se saisir d'office.
Le juge statue après avoir entendu les parties ou celles-ci appelées. Toutefois, lorsqu'il est saisi par requête, il statue sans audience, à moins qu'il n'estime nécessaire d'entendre les parties.
La décision rectificative est mentionnée sur la minute et sur les expéditions du jugement. Elle est notifiée comme le jugement.
Si la décision rectifiée est passée en force de chose jugée, la décision rectificative ne peut être attaquée que par la voie du recours en cassation. »

La cour, pour juger que la requête en rectification n’était pas soumise à la prescription, rappelle la nature de la requête en rectification d’erreur matérielle.

« Attendu qu’il résulte de ce texte que la requête en rectification d’erreur matérielle, qui ne tend qu’à réparer les erreurs ou omissions matérielles qui affectent un jugement et qui ne peut aboutir à une modification des droits et obligations reconnus aux parties dans la décision déférée, n’est pas soumise à un délai de prescription ; ».

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JUGEMENT RENDU PAR DÉFAUT

Aux termes de l’article 478 du CPC « Le jugement rendu par défaut ou le jugement réputé contradictoire au seul motif qu'il est susceptible d'appel est non avenu s'il n'a pas été notifié dans les six mois de sa date.
La procédure peut être reprise après réitération de la citation primitive. »

Au visa de ce texte, la Cour de cassation dans un arrêt publié au bulletin, rendu le 17 mai 2018, 2e chambre civile, n° de pourvoi 17-17409 a jugé que :
« Le jugement rendu par défaut ou le jugement réputé contradictoire au seul motif qu’il est susceptible d’appel est non avenu s’il n’a pas été notifié dans les six mois de sa date ; que cette disposition étant édictée au bénéfice de la seule partie qui n’a ni comparu ni été citée à personne, le caractère non avenu du jugement ainsi rendu ne peut être constaté qu’à sa demande ; ».

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CLAUSE DE CONCILIATION PRÉALABLE – DEMANDE RECONVENTIONNELLE – OUI

Dans un arrêt publié au bulletin, rendu le 30 mai 2018, la Cour de cassation, chambre commerciale, n° de pourvoi 16-26403 et 16-27691, a jugé « qu’ayant relevé que le contrat de prestation de services, qui fondait la demande reconventionnelle de la société STAR, contenait, à la différence du contrat de cession faisant l’objet de la demande principale de la société NRJ, une clause de conciliation préalable, la cour d’appel en a exactement déduit que la demande reconventionnelle devait être précédée d’une tentative de conciliation, laquelle ne pouvait être régularisée en cours d’instance ; ».

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RPVA – 748 -7 DU CPC

L’article 748-7 du CPC dispose : « Lorsqu'un acte doit être accompli avant l'expiration d'un délai et ne peut être transmis par voie électronique le dernier jour du délai pour une cause étrangère à celui qui l'accomplit, le délai est prorogé jusqu'au premier jour ouvrable suivant. »

Au visa des articles 748-7 et 748-9, la Cour de cassation, dans un arrêt publié au bulletin, rendu le 17 mai 2018, 2e chambre civile, n° de pourvoi 17-20001, a jugé que les dispositions de l’article 748-7 s’appliquaient même quand l’utilisation de la procédure par communication électronique était facultative.

Dans son arrêt la cour d’appel avait jugé que cette disposition ne s’appliquait pas, l’appelant pouvant régulariser son appel sur support papier et que son choix d’utiliser le RPVA, alors que cette voie n’était pas obligatoire, résultait de sa seule volonté.

La Cour de cassation casse cette décision en jugeant : « Qu’en statuant ainsi, par des motifs inopérants au regard du domaine d’application de l’article 748-7 susvisé et des conditions posées par ce texte, dont Mme X... se prévalait, la cour d’appel a violé les textes susvisés ; ».

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RPVA UTILISATION – JEX – SAISIE IMMOBILIÈRE – OUI

Au visa des articles R. 311-6 du code des procédures civiles d’exécution, 748-6 du code de procédure civile et 1 de l’arrêté du 7 avril 2009 relatif à la communication par voie électronique devant les tribunaux de grande instance, la Cour de cassation dans un arrêt publié au bulletin, rendu le 1er mars 2018, 2e chambre civile, n° de pourvoi : 16-25462, a jugé que l’usage du RPVA devant le juge de l’exécution en matière de saisie immobilière était possible.

La Cour d’appel, « pour déclarer caduc le commandement valant saisie immobilière, l’arrêt retient que le conseil de la banque a adressé sa demande de report de l’audience de vente forcée et ses pièces par la voie du réseau privé virtuel des avocats (RPVA), alors que la convention sur la communication électronique signée entre le barreau de Lorient et le tribunal de grande instance de Lorient n’incluait pas dans son périmètre les saisies immobilières, de sorte que le message, reçu au greffe, n’a pas été transmis au juge de l’exécution, qui en a déduit que la banque n’avait pas déposé de conclusions de report ; ».

La Cour de cassation casse cet arrêt en jugeant « Qu’en statuant ainsi, alors que l’arrêté du 7 avril 2009 n’exclut pas de son champ d’application les procédures de saisie immobilière, la cour d’appel a violé les textes susvisés ; ».

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RECOURS EN RÉVISION : DÉLAI POUR AGIR

Aux termes de l’article 528-1 du CPC « Si le jugement n'a pas été notifié dans le délai de deux ans de son prononcé, la partie qui a comparu n'est plus recevable à exercer un recours à titre principal après l'expiration dudit délai.

Cette disposition n'est applicable qu'aux jugements qui tranchent tout le principal et à ceux qui, statuant sur une exception de procédure, une fin de non-recevoir ou tout autre incident, mettent fin à l'instance. »

Ces dispositions s’appliquent-elles au recours en révision alors que l’article 596 du CPC dispose : « Le délai du recours en révision est de deux mois.

Il court à compter du jour où la partie a eu connaissance de la cause de révision qu'elle invoque. »

Dans un arrêt du 17 mai 2018, publié au bulletin, la Cour de cassation, 2e chambre civile, n° de pourvoi : 16-28742, a jugé par l’affirmative en considérant « qu’ayant retenu qu’il n’était pas justifié que l’arrêt du 4 février 2003 avait été, tout comme l’arrêt du 12 septembre 2002 qu’il rectifiait, notifié dans les deux ans de son prononcé, la cour d’appel en a exactement déduit, sans méconnaître l’article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, que M. David X..., qui avait régulièrement comparu, n’était plus recevable en application de l’article 528-1 du code de procédure civile, à exercer un recours en révision à son encontre ; que, par ce seul motif, la cour d’appel a légalement justifié sa décision ; ».


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VEILLE LEGISLATIVE
Décret 2018-928 du 29 octobre 2018

Le décret n° 2018-928 du 29 octobre 2018 relatif au contentieux de la sécurité sociale et de l'aide sociale a été publié au JO du 30 octobre 2018.

Il a pour objet de modifier certaines règles de procédure et d’organisation dans le cadre du traitement juridictionnel du contentieux de la sécurité sociale et de l’aide sociale.

Il entrera en application le 1er janvier 2019.